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Lorenzo CARCATERRA – Sleepers

sleepersTitre original : Sleepers (1995)
Edition : Arrow Books
Date de parution : 1996
Nbr de pages : 373
Prix constaté : 10.79€

Résumé :
Le  » Hell’s Kitchen  » des années soixante, quartier misérable et mal famé de Manhattan, c’est le décor de West Side Story. Des immeubles délabrés et des terrains vagues pour tout horizon. Pour échapper à l’asphyxie, quatre gosses se tournent vers la camaraderie, les filles, le base-ball, les jeux violents et le vagabondage. La rue leur appartient. Ils en ont fait leur paradis. Un chapardage qui tourne mal les en chasse. Michael, John, Tommy et Lorenzo sont jetés dans une maison de correction et livrés, une année durant, à la peur, à l’humiliation, au sadisme et au viol. Des années plus tard, le cauchemar n’est pas dissipé. Deux de ces enfants sont devenus des tueurs patentés. Et dans le coeur de chacun, désormais, la haine et le désir de se venger…

Impressions :
Nous avons tous des films qui nous ont marqué durablement, et dont une empreinte reste année après année. Pour moi, ce fut le cas avec Sleepers de Barry Levinson, qui m’avait vraiment bouleversée et émue à sa sortie et que je n’ai pas pu oublier… La superbe interprétation de Robert de Niro, de Jason Patrick et d’un Kevin Bacon à contre-emploi y était pour beaucoup, même si l’histoire en elle-même est marquante. Du coup, j’ai toujours été intriguée par le roman sur lequel le film était basé, une histoire vraie mais modifiée par son narrateur et protagoniste Lorenzo Carcaterra. Malheureusement, le roman restait introuvable depuis quelques années. Et puis j’ai eu la chance de me le voir offrir en vo par ma sœur (merki !). Zina qui voulait le lire elle aussi, et voilà l’occasion ou jamais de me lancer avec elle dans une lecture commune !

  Alors que dire ? Le roman a t’il suscité les mêmes fortes émotions en moi ? Oui, mille fois oui ! J’ai renoué avec plaisir avec notre quatuor de gamins issus de Hell’s Kitchen, avec leur camaraderie à toute épreuve, leurs familles dysfonctionnelles et leur amour pour la littérature et les mauvais coups. Si ce roman est avant tout l’histoire d’une belle amitié, c’est aussi celle de l’âme d’un quartier avec ses règles et ses codes que l’on se doit de respecter. Un quartier où un marié se fait descendre en plein mariage devant une multitude de témoins, un quartier où les gangs de jeunes filles n’ont rien à envier à leur pendant masculin, un quartier où la violence est monnaie courante et où l’on s’en accommode tant bien que mal. Violence domestique avec une banalisation de la violence faite aux épouses et à leur progéniture par un père alcoolique et démissionnaire, violence de la rue avec les gangs, les arnaqueurs, les petites frappes et les bookmakers. Et malgré toute cette âpreté, la loi du silence règne. On n’empiète pas sur les affaires des autres, on ne regarde pas ce qu’il se passe chez le voisin, on ferme les yeux tout simplement. Balancer, le pire crime que vous pourriez commettre aux yeux des habitants de Hell’s Kitchen. C’est un monde impitoyable. Mais comme le dit le narrateur « la mort est la seule chose qui vienne facilement à Hell’s Kitchen ».

  Le roman est divisé en trois tiers environ. Une partie qui nous présente nos quatre amis et leur quartier de Hell’s Kitchen, une autre partie qui nous raconte leur calvaire dans cette école-prison, et une partie qui se consacre à leur vengeance dix ans plus tard. La partie la plus dure, celle qui raconte les sévices subis par nos quatre amis en prison est heureusement la plus courte, mais c’est celle qui nous semble la plus longue. Bien que le narrateur n’entre pas les détails, les scènes sont suffisamment évocatrices pour vous prendre aux tripes et faire monter le dégout, la colère puis la haine en vous. Je n’ai pas pu m’empêcher de verser des larmes à la lecture de ces abus. Une stupide erreur de jeunesse ne devrait jamais être aussi lourde de conséquences. Lorenzo Carcaterra raconte fort bien la manière dont ses amis et lui se sont vus emmener dans une spirale infernale suite à une stupide bêtise, une farce qui a mal tourné. L’insouciance et le fragile équilibre qu’avait réussi à bâtir ces quatre gamins en se créant une amitié à toute épreuve est balayée en un instant. Sur ce point, la narration fait vraiment preuve de génie.

  La troisième et dernière partie, qui revient sur les conséquences physiques et psychologiques de ses sévices met un point final à l’intrigue en nous racontant la manière dont nos quatre amis se sont vengés plus de dix ans plus tard, par un concours de circonstance des plus banals. C’est l’occasion pour nous de voir ce que sont devenus les personnages mais aussi de voir que la chaine de l’amitié et les relations fortes qui se sont nouées au fil du temps ne sont pas à prendre à la légère. L’abnégation dont fait preuve le père Bobby lors du dénouement est le point culminant d’un récit riche en émotions. On a la gorge nouée et on referme Sleepers avec tristesse et joie. Un récit cruel mais émouvant et une belle leçon d’amitié.

Verdict : Avec les honneurs

rock

Pour lire l’avis d’une Zina conquise, c’est par ici !