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Claire CAMERON – L’ours

l'oursTitre original : The bear (2014)
Traduit par : Bernard Cohen
Date de parution : 21/01/2016
Editions : Kero
ISBN : 978-2-366-581829
Nbr de pages : 285
Prix constaté : 18.90€

Résumé :
Anna, 5 ans, et son petit frère Stick campent avec leurs parents dans un parc naturel sauvage lorsqu’ils sont surpris en pleine nuit par ce que la petite fille confond avec un gros chien. Le lendemain, Anna découvre qu’elle et Stick sont désormais seuls, et que c’est à elle, la « grande », qu’il incombe de protéger son frère. Débute alors pour les deux enfants isolés une dangereuse errance…

Impressions :
Inspiré d’un fait réel, ce roman sobrement baptisé « L’ours » est un véritable déchirement. Raconté par la petite Anna, 5 ans, qui utilise son langage d’enfant pour nous rendre compte d’une soirée de camping qui vire au cauchemar, ce récit chamboule le lecteur. Comment rester de marbre face à l’histoire de ces deux enfants en bas âge, livrés à eux-mêmes en pleine nature, leurs parents victimes d’un ours mangeur d’hommes ? Comment ne pas s’émouvoir devant cette narration faite de souvenirs et de sensations, représentant la perception du monde de cette enfant de 5 ans qui essaie de s’accrocher à la vie ? Claire Cameron livre un récit d’une puissance rare, sans jamais tomber dans le pathos.

  A la manière de « Room » d’Emma Donoghue, l’auteure imagine une narration faite par une enfant, avec tout ce que cela importe. Un langage limité. Une ponctuation défaillante. Des divagations, la jeune narratrice passant d’une idée à une autre en empruntant les chemins tortueux d’une concentration en dents de scie. C’est certes parfois laborieux à lire, mais cela fait son effet et remplit son rôle à merveille. On « est » dans l’esprit d’Anna, cette petite fille qui essaie de saisir le monde qui l’entoure avec ses propres mots. Le fait que l’auteure déroule les souvenirs de la fillette à partir du moment où ses parents se font agressés jusqu’à leur sauvetage n’en est que plus poignant. On voit tout le chemin elle a parcouru pour s’en tirer.

  Anna, est une petite fille très attachante et très courageuse. Prenant son rôle de grande sœur très au sérieux, elle dépasse ses limites pour tenter de le sauver. Seule, on peut s’imaginer qu’elle n’aurait pas su surmonter tous les obstacles. Faisant preuve de ruse à chaque instant pour mener son petit frère de deux ans vers la sécurité, on sent qu’elle se rend compte que ses parents ne les rejoindront sûrement pas. Sa vision du monde et de cet environnement hostile qui lui avait pourtant semblé amusant quand elle venait y prendre des vacances en famille nous apparait de manière imparfaite. L’ours devient un gros chien noir tout simplement parce qu’elle ne sait pas ce qu’est un ours, sa mère couchée dans un buisson semble se reposer. C’est bouleversant. Une lecture dont on ne sort pas indemne.

Verdict : Avec les honneurs

rock

Philippe NICHOLSON – Extramuros

extramurosParu le : 09/02/2015
Editions : Kero
ISBN : 978-2-36658134-8
Nbr de pages : 344
Prix constaté : 19.90€

Résumé :
Quand les entreprises auront pris le pouvoir, de quel côté du mur serez-vous ?
Dans un monde confronté à de fortes chaleurs et à une pénurie d’électricité, des zones d’affaires se sont multipliées. Elles assurent le confort et la sécurité des employés de grandes sociétés, séparés par de hauts murs électrifiés du commun des mortels aux conditions de vie de plus en plus difficiles. Les zones d’affaires, s’accaparant énergie et richesse, sont vite devenues plus puissantes que les pays qui les accueillent. L’Espagne vient de leur céder une de ses régions pour y édifier le premier état-entreprise, Evergreen. Mais dans le monde, la révolte gronde et la résistance s’organise. Le jeune Max souhaite en faire partie. Il va être entraîné malgré lui dans un engrenage qui risque non seulement de bouleverser sa vie, mais de changer la face du monde.

Impressions :
J’avais eu un gros coup de cœur pour le précédent roman de Philippe Nicholson qui était un savant mélange de thriller et de SF et poussait le lecteur à réfléchir sur notre société de consommation. Son héros, Fjord, un journaliste non-conformiste qui se retrouvait projeté au cœur d’une vaste conspiration, m’avait particulièrement plu et j’espérais pouvoir le retrouver dans d’autres aventures périlleuses. C’est chose faite avec « Extramuros », le nouveau roman de Nicholson paru chez Kero, qui met une nouvelle fois en scène Fjord. Un Fjord hors-système qui devra renouer avec les magouilles des zones d’affaires et se salir les mains pour sauver son fils.

  On retrouve dans ce second opus tous les ingrédients qui avaient fait de Serenitas une réussite : des complots à grande échelle, des malversions, une bonne dose de chantage et surtout un univers futuriste ultra-réaliste qui incite à la réflexion et nous interroge sur notre avenir. L’intrigue tourne une nouvelle fois autour des zones d’affaires. Zones d’affaires qui continuent à monter en puissance et qui, après avoir conquis un statut privilégié, espère conquérir un pays pour accéder à l’autonomie ultime… Jusqu’où serait-on prêt à aller pour acheter sa place au sein de la société ? Pour accéder à un boulot durable ? Avec accès illimité aux dernières technologies en matière de santé et de loisir ? Jusqu’où seriez-vous prêt à aller ?

  Si l’auteur soulève de nombreuses questions, il offre également au lecteur de nombreuses pistes de réflexion sur des thèmes forts comme l’insécurité, la liberté, l’écologie, les disparités économiques et sociales. On sent que Philippe Nicholson s’est documenté sur les sujets qu’il aborde. C’est un récit ambitieux et engagé qu’il livre. J’ai particulièrement apprécié l’idée développée sur les champs solaires. Exploiter cette manne « d’électricité » que l’on pourrait tirer du désert, avec toutes les conséquences que cela implique, voilà qui fait cogiter. Surtout quand on connait les répercussions actuelles de la création de l’aluminium par exemple…

  En deçà de ce désastre écologique promis, l’auteur n’oublie pas non plus la partie plus « politique » de son intrigue avec des manœuvres stratégiques dignes de la mafia. Les tactiques employées par les puissants pour mener un deal là où ils le veulent font froid dans le dos. Même l’ONU y prend ici pour son grade. Au beau milieu de ce jeu de dupes, Fjord et Max, son fils, essayent juste de survivre. Le côté contestataire de Fjord semble avoir été transmis à Max qui s’embarque dans une histoire dont les enjeux le dépassent. Comme son père dans « Serenitas ». Les voilà donc aux prises avec un terroriste prêt à tout pour atteindre son objectif. Beaucoup de suspense dans « Extramuros », bien que le début soit un peu long à mettre en place. Peut-être parce que j’attendais Fjord et qu’il n’est pas sur le devant de la scène tout de suite ! En bref, encore un très bon roman pour Philippe Nicholson que je continuerais de suivre avec plaisir !

Verdict : Avec les honneurs

rock