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Daniel HANOVER – La dague et la fortune, tome 1 : La voie du dragon

la dague et la fortune 1Illustration de couverture : Alejandro Colucci
Titre original : Dagger and the Coin, book 1: The Dragon’s Path (2011)
Paru le : 14/11/13
Edition : Fleuve Noir
ISBN : 978-2-265-09432-1
Nbr de pages :
Prix constaté : 21.90€

Résumé :
Autrefois, les dragons régnaient sans partage sur le monde. Mais ils ont disparu de la surface de la Terre… et la magie avec eux. Les royaume des hommes ont survécu, de même que les sanglantes intrigues de cour qui les animent. Et les seigneurs continuent à se servir aussi bien de la guerre que du commerce pour asseoir leur domination. Cithrin, orpheline, surdouée de la finance, Marcus, ancien soldat brisé par la mort de sa femme et de sa fille et Geder, noble philosophe en quête des origines du monde n’ont rien en commun. Pourtant, ces trois personnages vont se croiser sur l’échiquier d’un terrible conflit annoncé. Un conflit qui, une fois déjà, a détruit le monde. Et ouvert la Voie du Dragon.

Impressions :
Daniel Hanover ou Daniel Abraham à qui l’on doit « Les cités de lumière » dont j’avais lu et apprécié le premier tome, nous revient avec un nouveau cycle, plus épique cette fois-ci et prévu en cinq tomes. Ne vous laissez cependant pas berner par le titre de ce premier tome, il n’y a point de dragons dans ce tome introductif. Vous voilà prévenus ! Mais alors à quoi s’attendre en ouvrant « La voie du dragon » ? Eh bien, on navigue ici en terrain connu, ce premier tome mettant doucement en place les intrigues et les acteurs, en déplaçant l’objectif d’un personnage à un autre. Les chapitres sont d’ailleurs découpés par personnage, ce qui permet une immersion en douceur, avec d’un côté un conflit et des intrigues politiques et économiques et de l’autre des personnages qui se débattent dans ce monde sur le point d’éclater en guerre ouverte.

  En ce point la construction du récit est intéressante bien que classique, le pouvoir mis en place se divisant en deux factions et plusieurs personnages naviguant entre deux eaux. Heureusement, Daniel Hanover a pensé à faire rentrer un troisième parti dans la trame, un tiers qui s’immisce sournoisement, un tiers plus mystique qui laisse apparaitre un fil conducteur des plus intrigants (notamment sur la fin qui relance l’intérêt). La magie n’est donc pas au cœur de l’intrigue, l’auteur choisissant une nouvelle fois un parti pris original, en donnant aux manipulations économiques et à ses retombées, une place de choix. On dit bien que l’argent est le nerf de la guerre ! On ne peut plus vrai. De même que les complots et son lot de manipulation. On retrouve bien entendu le pouvoir en place mis à mal par un groupe de réformateurs qui vont se heurter à un groupe plus conservateur. Bref, du classique, l’auteur ne prenant pas de risque de ce côté-là.

  Le point qui m’a le plus emballé dans ce tome, c’est la façon dont l’auteur nous présente et fait évoluer ses personnages. S’il nous introduit au départ une jeune fille intelligente mais un peu naïve, un jeune noble obèse, amateur d’Histoire et bouc émissaire de ses pairs et un vieux noble loyal et intransigeant, on se rend peu à peu compte que les apparences sont trompeuses et que les premières impressions ne sont pas toujours bonnes. Certains personnages que l’on pensait « du bon côté » se révèlent plus malhonnête et cruel que prévu, et d’autres acculés, soit déploient l’étendue de leurs dons soit prennent de bien horribles décisions, aux conséquences tragiques. Les personnages de Cithrin, de Geder ou encore de maitre Kit sont en ce point des plus intéressants à suivre. Je regrette cependant que les autres personnages ne soient pas assez approfondis à mon goût ou pour certains qu’ils se révèlent trop « lisses ». C’est le cas avec Marcus et Yardem, le passé convenu de Marcus et sa présence dans l’histoire n’étant pas forcément très utile au final. En même temps, peut-être est-ce voulu par l’auteur, vu que l’on s’attend à ce qu’il soit le personnage principal… Bref, du bon mais du classique, qui parait parfois un peu longuet mais dont la fin relève l’intérêt.

Verdict : Bonne pioche

bonne-pioche

Christopher BUEHLMAN – Ceux de l’autre rive

ceux-de-l-autre-riveTitre original : Those across the river (2011)
Paru le : 12/09/2013
Edition : Fleuve Noir
ISBN : 978-2-265-09704-9
Nbr de pages : 351
Prix constaté : 20.50€

Résumé :
1935. Suite à un héritage, Frank et Eudora s’installent à Whitbrow, en Géorgie, ou le grand-père de Frank possédait une plantation. Le village, entouré d’une forêt obscure, se révèle accueillant, et le couple s’intègre vite à la communauté. Pourtant, en cherchant à retracer l’histoire de son aïeul, un général de l’armée confédérée esclavagiste, Frank va réveiller des forces qui le dépassent.

Impressions :
Ambiance petit hameau américain au milieu des années 30. Notre couple protagoniste vient de s’installer dans ce trou perdu de Georgie après avoir touché en héritage une charmante bicoque. L’occasion pour monsieur de renouer avec ses ancêtres honnis, propriétaires d’esclaves mal vus de la région, et d’y trouver l’inspiration pour un livre peut-être… L’occasion pour madame de devenir professeur dans la petite école du village et pour tous les deux de laisser leur passé tourmenté derrière eux… On se doute bien que le côté idyllique ne durera pas et que les culs terreux du coin ne se montreront pas si inoffensifs que ça. Sauf que… le récit nous fait doucement glisser dans une atmosphère fantastique à laquelle on ne s’attend pas forcément et qui prend de court. Un malaise insidieux nous submerge peu à peu et la forêt revêt des allures inquiétantes. Que se cache-t-il réellement au-delà de la rivière ? Pourquoi cette coutume qui consiste à envoyer des offrandes de cochons vivants de l’autre côté de la rivière se perpétue-t-elle ? A qui peut-on se fier ?

  Vous l’aurez compris ce roman est angoissant parce qu’il sait instiller une ambiance oppressante qui va de mal en pis. Entre la restitution réaliste d’une époque raciste et hostile aux étrangers et la lente décrépitude de ses petits villages qui n’offrent aucun débouché, le décor est posé. Les habitants du patelin qui sont encore très attachés au folklore et aux superstitions anciennes peinent à prendre parti et sont décrit comme des couards et des ladres qui précipiteront la fin de leur communauté. Quand les corps commencent à tomber, la machine est déjà en marche. J’ai particulièrement apprécié la façon dont Christopher Buehlman balise son intrigue en plaçant deci delà un élément qui trouvera son explication dans le schéma final. Notamment avec l’histoire de la plantation et le lynchage des esclaves. La narration ne s’encombre pas d’allusions et l’auteur est plutôt direct dans ses descriptions.

  Un certain nombre de choses m’ont tout de même chiffonnée. Premièrement les deux personnages principaux que l’on n’arrive pas à apprécier. Même s’il faut resituer notre couple dans le contexte de l’époque, j’ai trouvé qu’Eudora, l’épouse, était très caricaturale. Limite elle ne renvoie qu’un comportement sexuel, sans subtilité. La fin du roman me conforte dans cette impression. Dommage. De même certaines réactions des habitants sont un peu étranges et Frank, l’époux, ne réagit pas à ces bizarreries. C’est notamment le cas avec le comportement de Martin, que j’aurai envoyé bouler depuis longtemps personnellement. Pas très crédible. L’arrivée du fantastique sauve heureusement les pots cassés et le suspense fait le reste. L’épilogue du récit est plutôt bien choisi. Ça m’a rappelé Le bal des vampires de Polanski.

Verdict : Bonne pioche

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Sam SYKES – La Porte des éons, tome 1 : Le livre des abysses

laportedeséons1Illustration de couverture : Marc Simonetti
Titre original : The Aeon’s Gate, book 1: Tome of the Undergates (2010)
Paru le : 13/10/2011
Edition : Fleuve Noir
ISBN : 978-2-265-08900-6
Nbr de pages : 560
Prix constaté : 24€

Résumé :
La vie est rude pour les aventuriers.
En particulier pour Lenk, entouré de compagnons ayant une fâcheuse tendance à préférer s’entredéchirer plutôt que d’affronter leurs ennemis communs….
Mais Lenk lui-même doit composer avec ses propres problèmes. Notamment une voix qu’il est le seul à entendre et qui le pousse à tuer, encore et toujours.
Alors, imaginer que l’on charge cette bande de mécréants de retrouver le Livre des Abysses, un mystérieux artefact capable de libérer des démons… Il y a de quoi s’inquiéter.
Surtout quand on sait qu’ils ne sont pas les seuls dans cette quête.
La Reine Kraken compte bien revenir.

Impressions :
Vous ne connaissez peut être pas Sam Sykes, jeune auteur de fantasy américain, mais je suis sûre que le nom de sa mère vous dit quelque chose. Une certaine Diana Gabaldon… Si mère et fils n’ont rien à voir dans leur façon d’écrire ni dans les thèmes abordés, j’avoue que j’étais assez curieuse de découvrir ce que le fiston avait dans le ventre, surtout après avoir lu de bons échos sur la blogo anglophone. Ce premier tome de La porte des éons ne tient pourtant pas toutes ses promesses. Sam Sykes a essayé de nous pondre quelque chose à contre-courant de la fantasy habituelle, avec des anti-héros qui se tapent sur la gueule et dont les moeurs sont plus que douteuses, mais bizarrement l’ensemble ne colle (ou ne décolle) pas plus que ça. Même si je salue l’initiative. Il manque le petit truc qui fait que la sauce prend, l’ingrédient magique.

  L’histoire en elle-même est loin d’être mauvaise et les personnages sont plutôt hétéroclites et fouilllés, mais la narration parait un peu maladroite, les dialogues manquent de fluidité et d’authenticité, comme si on nous jouait une pièce les yeux collés sur le texte. D’ailleurs, c’est plutôt bizarre de faire coincider dans le même temps un langage châtié voire ordurier avec une prose plus soutenue voire gentilhomesque (et qui peut vite taper sur les nerfs). Le mélange des deux donne quelque chose de dissonant. De même on ne comprend pas grand chose au roman quand on le commence car l’auteur ne prend pas le temps de poser ses bases et ça manque clairement d’éclaircissement et de développement.

  Autre point négatif, c’est l’univers dans lequel évolue ce premier tome qui nous parait bien vide. La première partie se passe sur un bateau et on a vite l’impression de faire du sur-place, ça jette l’encre, ça flotte, ça coule. Si l’accent est mis sur les relations entre les personnages, passer la majeur partie du récit à se les faire se moucher puis s’embrocher n’était peut être pas la meilleure idée. Où est l’évolution ? Pourquoi restent-ils ensemble ? Et surtout où est le bagou et le culot qui devraient nous faire s’esclaffer devant leurs interactions ? Le bestiaire s’avère par contre original et flippant, sûrement l’élément le plus réussi du bouquin. Le mystère de la voix dans la tête de Lenk apporte aussi quelques interogations bienvenues. On est loin de la loufoquerie et du grand n’importe quoi jouissif d’un one piece comme j’ai pu le lire, mais si l’auteur corrige le tir dans le tome 2 peut être…

Verdict : Roulette Russe

roulette-russe

Don REARDEN – Le présage du corbeau

le-présage-du-corbeauTitre original : The raven’s gift (2011)
Paru le : 13/06/2013
Edition : Fleuve Noir
ISBN : 978-2-265-09691-2
Nbr de pages : 336
Prix constaté : 19.90€

Résumé :
John et Anna, un jeune couple de profs, ont tout quitté pour enseigner en Alaska, chez les Yupiks, une tribu inuit. L’intégration est difficile dans cette contrée si loin de tout, ravitaillée quelquefois dans l’année seulement. Lorsque l’hiver arrive, une grippe extrêmement virulente décime le village. John est bientôt seul et tente de rejoindre la civilisation. Sur son chemin, il rencontre une jeune aveugle et une vieille femme, deux Yupiks réfugiées dans une maison désertée.
Une incroyable odyssée commence alors pour les trois survivants…

Impressions :
Premier roman de Don Rearden, on sent que « Le présage du corbeau » a été longuement mûri et nourri par l’expérience de l’auteur qui vit en Alaska. Réfléchi, documenté (l’auteur connaissant parfaitement la culture Yupik et ça se ressent), visionnaire, Don Rearden nous livre un très bon premier roman, maitrisé et abouti. On pourrait pratiquement le qualifier de post-apo, la trame nous confrontant à une catastrophe écologique majeure survenue en Alaska et qui a pratiquement décimé tout la population et contaminé la faune et la flore. Dès les premières pages, l’auteur nous confronte à la tragédie sans nous apporter d’éléments de réponse, ceux-ci venant plus tard, les chapitres alternant entre passé et présent de manière à nous révéler au compte-gouttes les indices capable de lever le voile sur le mystère entourant cette catastrophe.

  Angoissant par son atmosphère qui apporte un malaise indicible au lecteur qui prend connaissance des divers éléments de l’intrigue, le suspense est très bien mené, l’auteur faisant des allées et venues chronologiques entre événements passés et présents. Au risque parfois de s’y perdre quelque peu, l’auteur usant de flach-back et de flash-forward dans un même chapitre, en utilisant juste un saut de ligne et en confrontant trois degrés dans le temps à certains moments. Heureusement l’histoire est si prenante, que l’on met vite ses procédés narratifs de côté pour se concentrer sur les fragments de révélations que l’auteur nous concède. Révélations sur le cataclysme bien entendu mais également sur les personnages dont on ne sait pas encore ce qu’ils sont devenus même si on le devine insidieusement.

  Entre deux phases de suspense et d’effroi, l’auteur nous ménage des pauses descriptives à couper le souffle, au beau milieu d’un paysage sauvage et virginal. L’environnement joue d’ailleurs un rôle considérable dans le roman, la contrée Yupik nous étant présentée tel un éden nourricier mais aussi hostile, pour qui ne sait pas le dompter. Une bonne connaissance de la région que l’auteur réussit à imposer à notre esprit avec la sensation du vent glacial sur notre visage et la faim qui nous taraude. Les émotions primaires et existentielles – la faim, la soif, la fatigue mentale et physique, le désespoir – autant de sensations qui nous heurtent de plein fouet tant les personnages nous apparaissent réalistes. On ressent la peur de John, son découragement, sa douleur d’avoir perdu un être cher mais aussi sa volonté d’aller de l’avant, malgré tout. Par volonté de préservation, par volonté de survie. Et la note de l’auteur en fin de roman nous glace d’effroi et nous rappelle qu’il ne faut jamais fermer les yeux. Jamais.

Verdict : Avec les honneurs

rock

Michael SCOTT et Colette FREEDMAN – Les 13 reliques, tome 1

Les Treize Reliques, tome 1Titre original : The Thirteen Hallows, book 1 (2011)
Paru le : 14/03/2013
Edition : Fleuve Noir
Collection : Thriller
ISBN : 398
Nbr de pages : 978-2-265-09625-7
Prix constaté : 19.90€

Résumé :
Sarah a sans le vouloir mis le doigt dans un engrenage diabolique. En aidant une vieille dame lors d’une agression, elle se retrouve en possession d’une vieille épée brisée. La femme lui a demandé de remettre cette relique sacrée à Owen, son petit-fils. Bientôt, Sarah et Owen, jeunes Londoniens à la vie ordinaire jusque-là, sont poursuivis par un couple de sadiques. Ces deux démonologues torturent et abattent brutalement plusieurs personnes âgées : les Gardiens des Reliques.
Sarah et Owen ont bien compris leur mission forcée : empêcher à tout prix que les deux tueurs ne rassemblent les treize objets, sinon le monde sombrerait dans le chaos et la destruction.

Ce que j’en ai pensé :
Treize reliques aux pouvoirs mystiques, des gardiens sacrés assassinés dans d’horribles conditions à tour de rôle et une course contre la montre engagée afin d’empêcher l’activation desdites reliques, tous les ingrédients étaient réunis pour offrir un bon moment de divertissement. Malheureusement, la sauce ne prend pas et le potentiel du roman est gâché par une enfilade de clichés et de situations téléphonées qui feraient rougir les téléfilms allemands diffusés en début d’après-midi sur M6. Autant vous dire que j’ai été fort déçue malgré un pitch de départ plein de promesses, mais que les deux auteurs n’ont pas su exploiter à sa juste valeur. Pire, ils accumulent les poncifs éculés des mauvais films des années 80, avec au choix : le(a) grand(e) prêtre(sse) qui tire son pouvoir de ses débauches sexuelles et sadomasochistes, les méchants skinheads, drogués, dépravés et forcément homosexuels, la jolie héroïne flamboyante à la chevelure rousse qui tombe sous le charme du jeune héros aux cheveux bouclés et aux yeux verts, et j’en passe et des meilleures… J’ai du mal à comprendre comment avec deux cerveaux (donc deux fois plus idées logiquement), on puisse encore tomber dans le piège de ses ficelles grossières.

  Le roman partait pourtant d’un postulat de départ intéressant, en lorgnant dans le genre de la fantasy avec une épée malveillante qui se nourrit de sang et de carnage. D’ailleurs, à y bien penser, ce sont les seuls passages qui réussissent à nous faire éprouver un semblant d’intérêt de tout le récit. Les retours à cette époque lointaine qui a vu naitre les reliques, sont des plus intéressants, et on aurait aimé en savoir plus à ce sujet. Las, les auteurs nous jettent pêle-mêle des idées piochées ça ou là, dans la culture celtique. On évoque le nom d’Arthur et de sa légendaire épée Excalibur, de l’Autremonde (un monde onirique parallèle où les ombres règnent) et bien sûr les fameuses 13 reliques du Royaume-Uni, qui font partie de la tradition Celte avec Dyrnwyn, l’épée noire. Mais encore une fois, c’est cousu de fil blanc (certaines situations manquent de logique), et on finit par se lasser de ses rebondissements que l’on voit arriver à l’avance. Entre les scènes de torture et les scènes de sexe (histoire de reconstituer ses réserves de pouvoir toutes les cinquante pages), nos héros fuient, se sentent toute chose en se regardant et… tranchent une tête de temps en temps ! Et j’exagère à peine. Sans compter que les méchants de l’histoire, entre les têtes pensantes et les sbires à leurs bottes, sont caricaturaux au possible (forcément ils aiment soumettre leurs victimes, forcément ce sont des pervers qui aiment la douleur, et ainsi de suite…). Bref, un four en ce qui me concerne.

Verdict : Planche de salut

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